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Forum pour la lutte contre l'impunité et l'injustice en Mauritanie.
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11 avril 2014

Avril 1989-Avril 2014 : 25ème anniversaire des déportations de Noirs mauritaniens par le régime raciste arabe de Mauritanie.

enfants noirs mauritaniens déportes au sénégal

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Manifeste des enfants négro mauritaniens déportés au Sénégal.

 

 

 

Africa International s'honore d'être le seul organe inter-africain à publier intégralement le manifeste des enfants Négro-Mauritaniens pourtant largement diffusé auprès de ses confrères et espère que sa diffusion à travers le Monde noir provoquera le même sursaut fraternel en faveur des Noirs mauritaniens que celui qui anime la communauté noire en faveur des Noirs d'Afrique du sud

 

Aux enfants du monde entier, nous dédions ce manifeste, à travers lequel, nous tenons à expliquer notre situation dans notre pays, la Mauritanie.

 

Notre pays se trouve en Afrique de l'Ouest, limité au nord par le Sahara Occidental et l'Algérie, à l'Est par le Mali. Au sud par le Sénégal et le Mali et à l'Ouest par l'Océan Atlantique. D'une superficie de 1 080 000 km2,  sa population est de 1 800 000 habitants. Elle se compose de deux grandes races : les Négro-africains dont la zone traditionnelle se trouve au sud du pays. Tout au long du fleuve Sénégal et les Arabo-Berbères dont la zone traditionnelle est le nord du pays.

 

Pendant la colonisation française (1850-1960). Notre zone traditionnelle fut. En 1905, suite à un décret colonial rattaché au territoire civil de la Mauritanie créé par les colons à cette date. Avant 1904, le sud de la Mauritanie était annexé (en 1855) à la colonie du Sénégal qui était une colonie française depuis 1659. L'application de ce décret de 1904 en 1905, divisa notre zone traditionnelle de part et d'autre du fleuve Sénégal (avec ce fleuve comme centre de  gravité notre civilisation millénaire) en partie sénégalaise et en partie mauritanienne. Cette division de notre peuple, l'occupation coloniale et toutes les exactions sur nos ancêtres, constituent à nos yeux une violation flagrante de nos droits historiques en tant que peuple, ayant une même histoire, un même passé et une même zone d'habitation : le Walo dans la pâme occidentale du fleuve, le Foula Toro dans la moyenne vallée du fleuve Sénégal et le Guidimakha dans la partie orientale de ce fleuve. En 1946, la France créa le territoire d'Outre Mer de Mauritanie et l'intégra dans l'Afrique occidentale française. De 1905 à 1960, période d'occupation de la Mauritanie en tant que territoire créé par le colonisateur, nous fûmes engagés par ces colons dans une cohabitation inéluctable avec les Arabo-Berbères, conformément au principe du respect de l'intangibilité des frontières héritées de la colonisation que les Africains avaient mis en place dans la charte de l'O.U.A. au lendemain des indépendances. Pendant toute la période qui va de 1905 à 1960, c'est-à-dire la création de la Mauritanie (1905) et son accession à l'indépendance (1960), le colonialisme français, bien qu'ayant pris la responsabilité de regrouper dans un seul pays, la Mauritanie, des populations arabo- berbères et négro-africains, ne s'est jamais soucié de maintenir la justice entre les Noirs et les Arabo-Berbères. Pour preuve, en Mauritanie, c'étaient les Nègres seulement qui payaient les impôts de capitation, c'est à dire  les impôts par tête de Nègres parce que considérés comme sujets français. Les Arabo-Berbères, eux, ne payaient aux colons que l'impôt appelé Zakat exigé par l'Islam qui est notre religion à tous. Comme les Arabo-Berbères, nos ancêtres payaient également la Zakat ou dîme. D'autres preuves de l'injustice coloniale, ce sont nos ancêtres qui étaient les seuls à payer les frais des guerres mondiales européennes. Les colons, avec leur supériorité militaire, exigeaient à nos ancêtres d'aller combattre sur les champs de bataille en Europe, batailles que nos ancêtres ne connaissaient pas.

 

Ils les réquisitionnaient par la force et les enrôlaient dans l'Armée française. En plus, en Mauritanie, seuls nos ancêtres étaient corvéables à merci, tout comme ils étaient les seuls à subir le mépris, les exactions de toutes sortes allant des assassinats (Abdoul Bocar Kane), aux pillages et réquisitions de biens, des punitions sans jugement, à la déportation.

 

 

Nous avons les preuves de tout ce que nous disons ici. Preuves que nous avons tirées des archives nationales du Sénégal et de la Mauritanie. Par exemple, nous avons calculé la somme que nos ancêtres ont payée pour les impôts de capitation de 1905 à 1959. Sur la base des données que nous avons tirées des archives nationales de la Mauritanie par l'intermédiaire de nos frères qui y sont restés et qui nous ont téléphonés. Cette somme fait en moyenne

5 400 000 F (Source : Archives nationales de la MauritanieE2/105 - Rapports politiques trimestriels 1921). Nous avons également toutes les références exactes de toutes les autres violations flagrantes des droits  de nos ancêtres par le colonialisme français et son alliance avec les Arabo-Berbéres contre notre peuple.           ;

 

A l'approche des indépendances, du fait de l'administration coloniale draconienne à l'égard de nos ancêtres du Sud, ils étaient les plus proches de cette administration coloniale. Par la  politique odieuse des cantons, nos ancêtres avaient une plus grande expérience de l'administration et étaient plus scolarisés que les Arabo-Berbères. Mais les colons français, par leur mépris du Noir, leur égoïsme. Et avidité de l'argent, ont choisi les Arabo-Berbères pour diriger le pays.

 

Nous savons que ce choix se justifiait par le racisme à l'égard des Noirs et par le désir des colons de rentabiliser les investissements qu'ils avaient débloqués pour l'exploitation du minerai de fer de Zouerate situé dans la zone traditionnelle des Arabo-Berbères. Ainsi. Vous voyez bien qu'après la première violation de nos droits fondamentaux (colonisation et division), la deuxième violation de nos droits fondamentaux (imposition de taxes exagérées et fondées sur la couleur), nous en arrivons à une troisième violation de nos droits fondamentaux par la carte de la prééminence des Arabo-Berbères sur les Négro-Mauritaniens que les colons ont jouée sur le dos nos ancêtres. Depuis que notre pays a accédé à l'indépendance, les Arabo-Berbères ayant le pouvoir ont d'abord commencé par détruire la prééminence des Nègres dans l'administration en engageant une politique d'extinction des cantons du Sud de la Mauritanie et une politique d'arabisation à outrance du pays.

 

En 1965. ils adoptèrent des dispositions de lois 65-025 et 65-026 rendant l'arabe obligatoire dans l'enseignement - En février 1966, à la suite de l'application de ces dispositions de lois, les élèves noirs décrétèrent une grève illimitée pour protester contre les inégalités que pouvait entraîner l'application de ces dispositions entre les deux ethnies : Négro-Africains et Arabo-Berbères. Cette grève illimitée déboucha sur une guerre civile raciale.

-          En 1979, intervient encore une autre circulaire 02 du Ministre de l'Enseignement secondaire tendant à accroître davantage l'arabisation introduite depuis 1965, et les élèves noirs décrétèrent à nouveau une grève illimitée de refus contre la volonté des Arabo-Berbères d'assimiler les Noirs. La grève fut cassée par le régime en emprisonnant la majorité des élèves noirs grévistes et la circulaire fut appliquée.- C'est à la suite de toutes ces violations de nos droits à la spécificité depuis l'époque coloniale et depuis l'indépendance qu'en 1986 des intellectuels Noirs après des recherches sérieuse sur la marginalisation des Noirs au niveau économique, politique, culturel et au niveau de leur méprise dans les discours officiels ont publié un document “LE MANIFESTE DU NEGRO-MAURITANIEN  OPPRIME...”  où ils montrèrent la domination pratique, théorique et la volonté d'assujettir les Noirs avec des chiffres et statistiques. Ils analysèrent le discours officiel par rapport au droit à la spécificité de la culture nègre dans la nation mauritanienne.

 

Les terres aux abords du fleuve sont données aux Arabo-Berbèresre nègre dans la Nation mauritanienne.-

 

Les Beydanes au pouvoir, profitèrent de la publication de ce manifeste pour arrêter, assassiner nos pères, grands frères, oncles et parents. En 1987, ils accusèrent encore les Noirs d'avoir voulu faire un coup d’état alors qu'ils n'avaient aucune preuve de ces accusations, aucune trace, aucun document.

 Bilan : trois officiers furent exécutés, une cinquantaine d'officiers et de sous-officiers condamnés à des travaux forcés à perpétuité et à des peines variant entre 5,10 et 20 ans de réclusion aux travaux forcés. Parmi ces prisonniers de 1986 et ceux de 1987, on enregistre à peu prés tous les six mois, trois à quatre assassinats par tortures et violences physiques. Il est clair au vu de tout cela, que les Arabo-Berberes, avec lesquels les colons nous ont obligés de cohabiter n'aiment pas la justice, la liberté, l'égalité, la fraternité.

 

En avril - juillet 1989, le régime au pouvoir, à la suite des événements Sénégalo - mauritaniens, en a profité pour nous déporter au Sénégal afin de se débarrasser de nous pour pouvoir confisquer nos terres traditionnelles aux abords du fleuve Sénégal, pour les donner aux Arabo-Berbères. Cela, nous le comprenons parfaitement parce que les Barrages de Diama et de Manantali à l'amont et à l'aval du fleuve Sénégal, permettront au sud peuplé uniquement de Négro-Africains, de se relever économiquement, ce que les Arabes ne veulent pas, parce que la puissance économique entraîne également une puissance politique. Voilà, pourquoi nous sommes déportés au Sénégal par notre Gouvernement. Certains d'entre nous sont ici sans leurs pères, et mères, certains des papas qui sont déportés ont laissé là-bas leurs fils. Certains ont leur père avec eux, sans la maman, certains ont la maman avec eux sans les frères et le père. Certains sont ici sans leur père et mère, tout comme des enfants sont restés à Nouakchott alors que leur père et mère sont avec nous.

 

Au total le nombre des déportés negro mauritaniens avoisine les 60 000 dont 20 % d'enfants.

Et, nous sommes tous venus sans vêtements, sans papiers d'état civil, sans chaussures, sans le sou. Le Gouvernement beydane a tout pris. Nous avons tenu à vous expliquer clairement notre situation parce que nous voulons, comme tous les enfants du monde entier, vivre libres, dignes heureux et respectés, quelle que soit notre couleur. Nous voulons comme tous les enfants du monde vivre à côté de Papa et Maman, dans la maison familiale et dans notre pays. Nous estimons que nous avons droit à la liberté, à la dignité à l'égalité avec les enfants arabo-berberes. Nous avons, comme eux, droit à la chaleur familiale, à la sécurité, à la paix et au droit à la différence que nos parents ont toujours revendiqué. Nous sommes Musulmans, mais nous ne sommes pas Arabes. Nous sommes des Négro-Africains, fiers de l'être et nous continuerons le combat pour notre identité culturelle dans la Nation mauritanienne. Nous pensons que c'est l'idéal de chaque individu: La différence dans l'universalité. La spécificité dans le cosmopolitisme. Nous disons comme nos parents : Non à la domination politique. Economique et culturelle. Non à la ségrégation raciale. Pour un dialogue des peuples et des cultures. Pour un dépassement des archaïsmes de l'humanité. Pour une civilisation de l'Universel dans la paix, le respect mutuel, l'amour, la fraternité.

 

Nous pensons que vous serez nos messagers, dans le monde entier pour l'extinction 'Ses archaïsmes de l'humanité, les préjugés raciaux et culturels.

 

LES ENFANTS NEGRO-MAURÏTANIENS DEPORTES AU SENEGAL

AFRICA INTERNATIONAL N° 219
 SEPTEMBRE 1989 •

 

 

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